La préface du Venin

La première édition du Chemin de Paradis fut publiée chez Calmann-Lévy en 1895. La préparation de l’ouvrage et son impression ont dû prendre un certain temps, car la préface, dédiée à Frédéric Amouretti, est datée de mai 1894.

Bien que le recueil de Contes qu’est Le Chemin de Paradis ne soit pas la toute première publication de Charles Maurras, celui-ci le présente dès le début de cette préface comme « mon premier livre ». Il est vrai que Théodore Aubanel (1889) et Jean Moréas (1891) peuvent être considérés comme de simples brochures. Mais la vraie raison n’est sans doute pas là. Continuer la lecture de « La préface du Venin »

Tir à vue sur les Barbares

Charles Maurras n’appréciait guère les Parnassiens.

Née dans les années 1860, cette école de poésie était toujours active et prolixe à l’approche des années 1900, une période où la critique littéraire constituait l’essentiel de l’activité, et des revenus, du jeune Maurras. Les jugements qu’il portait alors sur le Parnasse ne sont donc pas des études sur une œuvre passée dont le temps écoulé a pu mesurer le succès et la portée, mais des réactions à chaud sur des poèmes qui venaient d’être publiés. Et ces jugements ne sont jamais très élogieux. Continuer la lecture de « Tir à vue sur les Barbares »

La Chair, le Scapulaire et le Suicide

La Bonne Mort est l’un des plus anciens, et en tous cas le plus mystérieux, des neuf contes du Chemin de Paradis. Il a failli donner son nom, ou presque, au recueil lui-même, qui devait à l’origine s’appeler La Douce Mort. Charles Maurras, dans un extrait de lettre cité par Roger Joseph et Jean Forges, donnait des détails sur son projet de publication.

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En Arles, aux temps de Trophime

Qui était ce Trophime, compagnon de Lazare, arrivé en Provence avec les saintes Maries, donné comme premier évêque d’Arles ? Fut-il, de par des polémiques savantes ou naïves, et à l’instar de Marie-Madeleine, un ou plusieurs personnages ? Les écrits ne s’accordent guère entre eux, et le font voyager de plusieurs siècles d’un coup, en cette antiquité romaine où l’histoire de la Provence n’était pas consignée dans les archives reliées du bulletin des débats d’une Assemblée…

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Quand les Sybarites périrent de plaisir

Nous commençons aujourd’hui la publication, qui se poursuivra sur plusieurs épisodes, des contes du Chemin de Paradis. Cette œuvre majeure de Charles Maurras est une collation de neuf textes publiés entre 1892 et 1894 dans diverses revues. Œuvre de jeunesse, de badinage philosophique, Le Chemin de Paradis se trouva bientôt au centre des attaques des démocrates-chrétiens qui y voyaient une entreprise païenne et blasphématoire. La réédition de 1921, et toutes celles qui suivirent, est expurgée des passages les plus « anti-chrétiens » et accompagnée d’une nouvelle préface (devenue ensuite postface) qui explique, justifie, relativise, minimise… mais cela ne fera pas taire la polémique, si bien qu’il est impossible désormais de lire ces Contes au premier degré, en faisant abstraction de toutes les interprétations que leur ont données admirateurs, contempteurs et exégètes.

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Mythe et Mystique d’une France ultra-profonde

Émile Pouvillon
Émile Pouvillon.
Imaginons une parcelle de France villageoise surgie des temps révolus, abyssale à force d’être rurale, profonde d’entre les profondes, fossile d’entre les fossiles. Plaçons-y des personnages plus enracinés dans leur terroir que les moules sur leur rocher, qui toute leur vie durant n’auront pas franchi la ligne d’horizon d’où l’on cesse de voir le clocher à l’ombre duquel on naît et meurt. Puis, de cette scène où rien ne se passe, où rien ne change, faisons un roman de mœurs…

C’est la gageure que s’était donnée un certain Émile Pouvillon (1840–1906), au temps du naturalisme triomphant. Mais alors que Zola situait ses créations dans le tourment de l’évolution, dans l’ébullition de la marmite sociale, Pouvillon les imagine près du zéro absolu, là où les corps chimiques ne révèlent que des proto-comportements, sa thèse étant sans doute que c’est là qu’on peut le mieux observer d’où nous venons et de quoi nous sommes faits…

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