« Votez, je vote, votons tous. La devise de notre Action française est d’agir, d’avancer, de manifester “par tous les moyens”, même légaux. »
C’est ainsi que se termine cette « Politique » de Charles Maurras dans L’Action française du 27 mars 1908. Est-ce la première mention de la célèbre formule ? nous ne saurions l’assurer complètement, mais c’est à coup sûr la première fois que l’on trouve cette fameuse devise sous la plume de Maurras et dans L’Action française quotidienne.
À propos de quoi ? À propos d’une idée émise par Ernest Judet : essayer de faire porter les élections parisiennes à venir sur Zola, dont l’entrée au Panthéon déchaînait les passions et dont la récente affaire Soleilland avait ravivé le souvenir, à la croisée des engagements humanistes contre la peine de mort, du naturalisme « dégoûtant » et des dreyfusards qui défendaient Fallières d’avoir grâcié l’assassin, l’envoyant ainsi au bagne plutôt qu’à l’échafaud.
«Tous les moyens, même légaux » ne signifie donc pas qu’il faille prendre parti dans le jeu politique pour lui-même ou en acceptant ses règles faites par et pour les partis. Cette légalité, c’est celle d’un simple moyen, précisément, pas la mystique révolutionnaire de la Loi dont on serait dupe. Le texte de Maurras est aussi clair que l’idée d’Ernest Judet qu’il reprend : il s’agit ni plus ni moins que d’un détounement du débat politique, de son utilisation légale mais guère démocratique ou républicaine.
Et Soleilland ? Il fut déporté en Guyane où, en septembre 1912, il tente d’étrangler un jeune forçat qui se refusait à lui, et qui, en se défendant, le blesse gravement d’un coup de lime. Devenu en outre tuberculeux, il meurt à l’hôpital de Kourou en mai 1920.