Politique d’abord ! mais l’action sociale alors ? Le débat est récurrent, déchaîne à l’occasion les passions. Maurras y revient en 1937, dans une lettre publiée par L’Étudiant français à l’occasion de querelles avec divers mouvements, dont les Croix de feu du colonel de La Rocque.
L’argumentation de Maurras pour défendre le politique d’abord, y compris contre ceux qui prôneraient l’action sociale par fidélité au « maurrassisme » paraîtra étonnante sur au moins un point : c’est que l’action sociale mène à l’électoralisme, alors que l’action politique n’y mènerait pas.
Cela permet de préciser le sens de ce « politique d’abord », et nous avons déjà rencontré ce qu’il signifie dans de nombreux textes, rejoignant par exemple les analyses bien plus amples de Kiel et Tanger : seul un changement du régime, une destruction de la république et son remplacement par la monarchie, peut avoir un sens proprement politique. De la participation aux élections jusqu’à l’instauration d’un régime corporatif, tout le reste, si l’on tente de le mettre en œuvre seul, ne serait que social, pas politique au sens que lui donne Maurras. Non que Maurras nie que le champ social ait son importance propre, mais cette action sociale ne serait qu’une vue de l’esprit : les conditions de sa réussite ne seraient pas réunies sans changement, ni même celles de sa mise en œuvre réelle. D’ailleurs, sur ce plan là, la gauche du Front populaire aura toujours un temps d’avance, car elle regardera moins à la démagogie. La question est donc bien une question de régime, y compris quant au progrès social possible et réel, celui qui ne se réduirait pas à l’électoralisme.
On retiendra un autre enseignement, plus lapidaire, mais essentiel : Maurras lui-même nous l’assure, il n’y a pas de « maurrassisme ». Là encore, il n’y a que la monarchie.