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Ni peste
ni colère…

À Chrysès, prêtre d'Apollon.

Silencieux, longeant la mer retentissante,
Ô vieillard, tu t'en vas, sous le poids des destins ;
Ils ne t'ont pas rendu la vierge florissante,
Dorure de l'automne en son rose matin.

Chryséis, ô vieillard, était plus que ta fille,
Sa corolle s'ouvrait au milieu de ton cœur ;
Étant prêtre du Dieu qui réchauffe et qui brille,
Tu te rêvais du Temps le facile vainqueur.

Mais sur un lit lointain t'apparaît le carnage,
Tu vois fuir et pleurer la pourpre de ton sang,
Ô Père ! un pâle lys de cette ombre surnage
Où s'apaise la honte et le bonheur descend.

La vierge entrelacée au maître qui l'opprime
Connaît quelque douceur de son rude ennemi ;
Sous le sceau flamboyant qui marque la victime,
Amour, en Chryséis, ô Chrysès, a gémi.

Lave tes froides mains dans l'écume de l'onde,
Mais ne maudis personne et tiens-toi de nourrir
De nouvelles douleurs les tristesses d'un monde
Où d'eux mêmes tes maux avec toi vont mourir.

Charles Maurras

 

bois gravé de Michel Jamar pour Ni peste ni colère, de Charles Maurras

 

Ce poème aurait été composé le 19 janvier 1944. Mais il n'a été publié qu'en 1951, avant d'être repris dans La Balance intérieure, puis dans les Œuvres capitales.
Le bois gravé est l'œuvre de Michel Jamar.

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