Rudesse des murailles et laideur des visages

Panorama de Florence depuis San-Miniato-al-Monte

En février 1897, Charles Maurras passe huit jours à Florence. Ses impressions seront consignées dans trois articles publiés par la Gazette de France les 15 mars, 22 mars et 10 mai ; à leur tour, ces articles dont le titre d’origine est « À Florence, premières vues » donneront naissance aux « livres » IV et V d’Anthinéa, recueil qui paraît en 1901. La partie consacrée à Florence s’y trouve en troisième position, après Athènes et la Corse, avant la Provence.

Nous publions aujourd’hui le livre V, qui contient en fait l’ensemble des réflexions de Maurras sur Florence et son histoire, puis sur les considérations sociologiques et géopolitiques que cette ville unique entre toutes a pu lui inspirer — le livre IV n’étant consacré qu’à un seul musée, qui aurait fort bien pu se trouver ailleurs. Toute la Florence de Maurras est donc dans ce Génie toscan.

Il s’agit de tout sauf d’un guide touristique ! Les commentaires de Maurras peuvent sembler sévères en première lecture. Mais toute personne qui a visité Florence autrement qu’en consommateur passif de produits culturels prémâchés s’y retrouvera étonnamment. Au delà de l’amoncellement infini des musées, des palais, des tableaux et des sculptures, Maurras décrypte comment la rencontre, là et non ailleurs, d’un déterminisme topographique (toscan) et d’un hasard humain (le génie) y a produit un paroxysme civilisationnel où l’art, la puissance et la débauche ont atteint des sommets inconnus et ont contribué à « brûler » précocement les personnages acteurs de cette vie trop intense.

Une seule différence, notable, entre 1897 et aujourd’hui : Maurras ne fait aucune mention du bruit. Était-ce déjà un effet de sa surdité, ou bien le tintamarre continu et infernal qui baigne la Florence contemporaine date-t-il de l’invasion de l’automobile ?