Munich

Une de l'AF du 1er octobre 1938 (détail)

Nous vous proposons aujourd’hui l’article de Charles Maurras dans L’Action française du premier octobre 1938, soit le lendemain des accords de Munich et après le retour d’Édouard Daladier à Paris.

On a répété à l’envie le mot de Daladier alors qu’on l’acclamait d’avoir sauvé la paix, « Ah, les cons ! s’ils savaient ! » Mot problématique car il n’aurait été entendu que par le seul Alexis Léger — plus connu comme poète sous le nom de Saint-John Perse — qui était alors secrétaire général des Affaires étrangères.

Le soulagement fut général, mais pas pour les mêmes raisons dans tous les partis. La position de l’Action française, qui déjà avait fait plusieurs campagnes pour le réarmement face à l’Allemagne nazie, est assez simple et se développait en trois temps :

  • La guerre était impossible dans de bonnes conditions alors que le Front populaire avait fait baisser la production, avait mis l’armée en mauvaise posture, et avait introduit de profondes divisions dans le pays en soutenant en sous-main tant qu’il pouvait les communistes espagnols. En outre la politique de Blum avait été, pour des raisons de politique partisane, de pousser l’Italie à se rapprocher de l’Allemagne : « je ne peux oublier que Mussolini a fait tuer Matteotti » avait été la pauvre réponse de Blum aux ouvertures italiennes qui lui avaient été transmises par Jacques Chastenet via Malvy. La France se trouvait donc, du fait du Front populaire et de ses séquelles, en trop mauvaise posture pour engager la guerre, sauf à être contrainte à une guerre défensive par une attaque allemande.
  • Il importait donc de l’éviter à tout prix, d’où les homériques passes d’armes avant Munich entre L’Action française, menée par un Daudet tirant salve sur salve dans ses articles à la une, et les partisans d’une ligne plus dure face à l’Allemagne, qui n’avaient pas les moyens de la politique qu’ils prônaient, au premier rang desquels Paul Reynaud, dont le tortueux jeu diplomatique faisait sa part à la politique politicienne intérieure et à son éternelle concurrence avec Daladier.
  • Enfin, la paix sauvegardée, il faudra réarmer et se préparer à la guerre probable sinon inévitable : l’A. F. avait déjà mené et mènera quantité de campagnes sur ce thème d’évidence : réarmer contre l’Allemagne ; on sait combien sa dernière campagne avant guerre sur la nécessité de renforcer l’aviation française sera peu écoutée et combien la maîtrise de l’air par l’Allemagne sera déterminante dans la campagne de France et le désastre de l’été 40.

C’est l’ensemble de ces positions que Maurras reprend, développe, applique à l’actualité immédiate dans cet article du jour d’après Munich. Et, comme souvent, l’article fait appel aux dons pour équilibrer les comptes du journal, perpétuel déficitaire.