L’école de la religion républicaine

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On ne saurait mieux résumer les griefs contre l’école républicaine que ne le fait Maurras dans ce texte de 1928, paru dans l’Almanach de l’Action française et intitulé « L’École laïque contre la France » : « (…) on pourrait négliger ce fait, d’ailleurs patent, que cette école est une très mauvaise école. Du point de vue de la justice, il suffit pour condamner cette école que, enseignant la doctrine de quelques-uns, elle soit payée par tous et obligatoire pour tous, en particulier pour ceux qui n’ont aucun moyen de se défendre contre ses inventions, ses conjectures, ses frénésies et ses fanatismes. »

Sans doute les insuffisances morales ou simplement intellectuelles de l’école de Jules Ferry sont présentées avant tout par Maurras : sa fausse neutralité qui en fait l’église ou du moins la salle paroissiale du culte républicain, sa vision de l’histoire qui est anti-nationale jusqu’à l’incohérence, et jusqu’à son élitisme masqué derrière la gratuité puisque seuls les enfants des bourgeois assez riches pour prendre soin par ailleurs de l’éducation de leur progéniture peuvent prétendre échapper à son influence.

Tout cela n’est guère neuf quand Maurras en fait la synthèse, et l’on peut même dire que reformulant ces griefs, les articulant et les composant, il ne se fait guère d’illusions sur leur portée politique pratique. Et c’est en politique justement qu’il tire la seule leçon qui vaille, et pense à frapper cette école au seul endroit qui lui serait douloureux : cette école républicaine, républicaine militante, n’a pas à être payé par ceux qui ne sont pas républicains.

La leçon, il faut bien le reconnaître, a peu porté ; il semble que les royalistes ont toujours plus voulu une impossible école d’État selon leurs goûts ou leurs idées qu’ils n’ont cherché à populariser des solutions comme le chèque scolaire ou l’école associative. On répondra que la République ne les a guère aidé, elle pour qui l’école — aussi mal en point qu’on la constate — reste un mythe fondateur. Et que les foules de contribuables royalistes étant ce qu’elles sont, la solution esquissée paraît vidée de la plus grande partie du sens qu’elle avait encore en 1928.

Il n’en reste pas moins que ce texte est exemplaire du mouvement de la pensée de Maurras : sans renier les arguments traditionnels, il ne s’arrête pas à eux mais ne les relâche qu’après les avoir recomposés et refondus pour leur faire appuyer une maxime politique pratique, réaliste et autant que possible profitable.

L’article est accompagné dans l’Almanach du portrait de Charles Maurras qui ouvre cet article et d’un fac-simile de sa signature.